dimanche 27 février 2011

Soyez avertis, à la Noce du Théâtre Prospero, TOUT EST PERMIS !


Un texte de l’auteur allemand Bertolt Brecht, une mise en scène de Gregory Hlady, une joyeuse bande de fous qui jouent les acteurs, une Noce où tout finit par éclater : le rire, les secrets, les pulsions et les meubles. Une proposition originale, une scénographie admirable. Cette soirée au Théâtre Prospero en est une dont je vais assurément me rappeler. 

Avant même que les invités ne prennent place autour du festin, la délicieuse Diane Ouimet (la mère) nous accueille en se présentant à nous, en échangeant quelques paroles allemandes, en nous aidant à trouver un siège et en diffusant une énergie enveloppante qui augure bien pour le reste de la soirée. À 20 heures tapant, l’allemand prend la porte et les invités prennent leurs places. Le Prospero, fabuleux petit théâtre sur la rue Ontario, peut alors être témoin de la fameuse Noce de Bertolt Brecht.

La Noce est une fascinante courtepointe cousue autour de petits moments qui partent dans tous les sens, mais qui ne perdent jamais de vue ce qu’ils ont en commun : la maîtrise des faux-semblants. On regarde huit convives en train de manger, de boire, de fumer et de danser, en plus d’admirer la facilité avec laquelle tout le monde réussit à se construire une façade. Heureusement pour nous, le plancher craque rapidement. Les pulsions prennent le dessus. Les mensonges ne tiennent plus la route. L’exaspération essaie de s’affirmer. L’impatience prend toute la place. Le non-dit écrase tout sur son passage. Le premier embrasse la deuxième, la deuxième choisit de danser avec un autre, cet autre se permet de baiser et de choquer tout ce qui bouge, tout ce qui bouge s’engueule avec son mari, son mari… Vous voyez le genre ?

Pendant la majeure partie du spectacle, on envie franchement les huit invités de la soirée. Aucune censure, aucun filtre à pulsion, aucune peur du ridicule. On fonce dans le tas, et on s’amuse. Même si les mensonges sont trahis, que la moitié des convives sont blessés à un moment ou à un autre, et qu’on en vient à comprendre la raison d’être de la rectitude politique (pour le meilleur et pour le pire), l’ensemble de l’œuvre a l’air furieusement agréable à jouer. À quelques détails près, tous les acteurs sont merveilleux, drôles, crédibles, débordants d’énergie et sincèrement divertissants à voir aller.

Même son de cloche du côté de la mise en scène. Nos yeux ont quelque chose à voir dans tous les coins, il y a toujours quelqu’un qui bouge, qui monte sur une table, qui brise une chaise, qui baise au deuxième étage, qui resserre à boire, qui invite à danser, et qui garde notre œil allumé jusqu’à la fin. Pendant ces quelques instants où mari et femme courent dans un escalier et que madame finit par sauter dans les bras de monsieur, tout est tellement bien chorégraphié et intégré par les acteurs que rien ne nous apparaît trop placé.

Si ce n’était de cette impression que la pièce de théâtre dure 30 minutes de trop, en nous infligeant le même sentiment que les mariés ressentent à l’idée que leurs invités se décident enfin à partir, tout de La Noce est une merveilleuse réussite.

Samuel Larochelle, dit le Sage Gamin

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire