dimanche 27 mars 2011

Plus de 5 ans de ma vie à faire du théâtre avec Marie Laberge, Rita Lafontaine et les autres

En ce dimanche 27 mars, journée mondiale du théâtre, les auditions battent leur plein à l’École Nationale et au Conservatoire d’art dramatique de Montréal. Il m’est donc apparu chronologiquement pertinent de vous parler de théâtre. Pas du théâtre des autres pour une fois, mais du mien.

Malgré l'amour infini que je porte au théâtre depuis des années, je constate que celui-ci a fait son entrée dans ma vie seulement vers l’âge de 16 ans, lorsque ma petite ville de région s’est dotée d’une école de théâtre.

-Maman, papa, je veux suivre des cours de théâtre !, avais-je crié à l'époque.

Pendant huit mois, les lundi à 20h, j'ai fait partie d’un groupe qui enchaînait les exercices initiatiques sur la diction, la voix, l’improvisation et la lecture à vue. Nous avons présenté un extrait du Malade Imaginaire à la période des Fêtes et conclu l’année avec environ 20 minutes de la pièce Le Banc, écrite par Marie Laberge. J’y jouais un charmant vieillard, Albert Parent, qui prenait sa marche de santé à tous les jours en s’arrêtant dans le petit parc en face de chez lui pour radoter ses histoires à qui voulait bien l’entendre. J’ai cherché pendant deux semaines une façon de reproduire la voix d’un vieux radoteux. Au début, mes multiples tentatives sonnaient comme une triste imitation de René Angélil post-cancer. Heureusement, les choses se sont vite replacées lorsque je me suis inspiré de mon propre grand-père. J’avais enfin trouvé la vois du petit vieux en moi. En profitant par la suite du costume et du maquillage magnifiques qu'on m'avait faits, je me sentais fin prêt pour aller jouer sur scène. Bien entendu, je jouais avec le talent d’un jeune de 16 ans, mais je ne récitais pas mon texte, et on croyait à mon vieillard. J’étais fier.

L’année suivante, j’arrivais au cégep dans une nouvelle ville, j’essayais de m’adapter à la nouveauté et je faisais le choix de ne pas m'impliquer dans les activités parascolaires. L’année suivante, après m'être rongé les sangs pendant des mois, je me suis assuré d'être le premier en ligne pour m’inscrire. Avec l'aide d'une metteure en scène merveilleusement passionnée, nous avons monté le sublime texte de Pierre-Michel Tremblay : Le rire de la mer, une comédie dramatique brillante, touchante et hilarante. J’y jouais alors quatre personnages : un docteur d’une froideur sans nom, la Mort en personne, l’ange Dirdudirel (un ange de 6 pieds 4 pouces : c’était de toute beauté…), et nul autre que Molière, qui revivait sa mort en direct en s’interrogeant sur la qualité du spectacle qu’il avait offert en mourrant sur scène. Un pur bonheur. Cette année-là, notre troupe a été sélectionnée pour représenter la région au Festival Intercollégial de théâtre à Sherbooke. Même si le trac était immense, le rire et les émotions se mélangeaient avec un équilibre tellement bien maîtrisé que plusieurs spectateurs ont affirmé que nous avions offert la meilleure production du festival.

L’année suivante, je savais qu’il m’était impossible de revivre pareille expérience. J’ai donc choisi de monter mon propre projet. J’ai proposé à une amie de faire la mise en scène, j'ai choisi le texte, j'ai trouvé les deux autres acteurs, et je me suis réservé le rôle principal. J’avais envie de tenir une pièce sur mes épaules. Après de longues recherches, mon choix s’est arrêté sur un petit bijou, Les Sept Jours de Simon Labrosse, une pièce écrite par Carole Fréchette.

« Acteur et spectateur de la vie ordinaire, Simon est peu soutenu par ses amis, Léo, le poète négatif, et Nathalie, obsédée d’épanouissement personnel. Simon Labrosse se bat avec fébrilité et dérision contre le système qui l’étouffe, ce monde pourri sur lequel "il pleut des briques". Il n’a qu’une arme pour se défendre : il est vivant. »

Dans la pièce, Simon Labrosse s’invente des métiers pour s’occuper : amoureux à distance, cascadeur émotif, finisseur de phrase, remplisseur de vide, spectateur personnel. Moi qui voulais jouer du « naturel » après être allé dans les zones extrêmement éloignées de ma personne, j’étais parfaitement servi par le rôle de Simon Labrosse. Au moins d’avril 2006, nous avons participé au Festival de Théâtre Régional au Café-théâtre Côté-Cour sur la rue de la Frabrique, à Jonquière. Notre  production était loin d’être parfaite, mais c’était beau et j’aimais profondément mon personnage. Une amie  m’avait d’ailleurs dit à la fin du spectacle : « Je sais qu’il te ressemble beaucoup, mais je suis tombée en amour avec Simon ce soir, pas avec Samuel. » C’était le plus beau cadeau qu’on pouvait me faire. Pendant la pièce, mon Simon n’avait pas les excès de colère flamboyants de son ami Léo, ni les excentricités de Nathalie, mais il était le pilier central de la pièce. Avec environ 40 minutes de texte sur 75 à retenir, une présence sur scène du début à la fin, je servais de fil conducteur pour l'histoire et pour chacun de mes partenaires de jeu. Je n’avais pas l’attention du public en tous temps, mais j’étais là, solidement là.

En sortant de scène après notre deuxième représentation, le 2 avril 2006, je venais de faire un choix : j’allais consacrer la majeure partie de la prochaine année à préparer mes auditions et à tenter de faire ma place dans une école de théâtre. Avec mon diplôme de journalisme en poche, je pouvais maintenant vagabonder comme je le désirais. J’avais seulement 19 ans après tout.

Dieu seul sait à quel point les choses ont changé depuis. Tant d’événements sont venus influencer mes choix. Des ateliers chez Danièle Fichaud, des collègues de classes qui ont fait leur place dans les grandes écoles, une autre qui a joué dans le film Incendies de Denis Villeneuve, mes propres auditions dans les cégeps, dans les conservatoires et à l’École Nationale, d’autres auditions à servir de réplique de dernière minute à l’amie d’un ami, ma rencontre avec Rita Lafontaine qui a supervisé mon travail pendant quelques heures, et bien plus encore à raconter.

Une prochaine fois.

Samuel Larochelle, dit le Sage Gamin

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