lundi 10 octobre 2011

Critique - L’École des Femmes marque le lancement des 60 ans du TNM

Lors de sa fondation en 1951, le Théâtre du Nouveau-Monde a entrepris ses activités en présentant L’Avare de Molière. Quelque 60 ans plus tard, la directrice du TNM, Lorraine Pintal, a choisi de lancer les festivités théâtrales avec un autre classique parmi les classiques : L’École des Femmes, symbole par excellence de l’oppression des femmes d’antan, le tout arrosé de beaucoup d’humour et de la touche toute personnelle du metteur en scène Yves Desgagnés.

Guy Nadon joue Arnolphe, un homme revenant chez lui avec un nouveau statut, se faisant maintenant appeler Monsieur de la Souche. L’homme héberge chez lui Agnès (Sophie Desmarais), jeune fille en fleur de quelques décennies sa cadette, qu’il veut garder ignorante et innocente, pour ne pas dire sotte, car il se méfie de l’intelligence, de la réflexion et des revendications des femmes. Lors de son retour, il croise un jeune ami, du nom de Horace (Jean-Philippe Baril-Guérard), qui lui raconte – sans réellement savoir à qui il parle – son amour brûlant pour une certaine… Agnès. S’en suivent alors farces, jeux d’esprit, confrontations et quiproquos jusqu’à la finale. Du Molière quoi.

En assistant à la représentation de l’École des Femmes version TNM 2011, c’est d’abord le travail de mise en scène que l’on remarque. Guy Nadon fait son entrée sans trop savoir où il est, un assistant vient lui porter son texte pour « l’aider » à démarrer, un personnage l’aide à compléter son costume, quelques coups de bâton permettent à deux rideaux de se lever sur un décor ou des systèmes d’éclairage et de tuyauterie sont visibles. Puis, graduellement, le tout devient théâtre.

Dès les premiers instants, l’incertitude nous gagne. Naturellement, il est peu fréquent de voir un Molière monté avec anachronismes et méthodes théâtrales plus ou moins conventionnelles. Pourtant, on finit par se dire que l’idée permet de désacraliser la chose et de célébrer la concrétisation d’un classique dans une institution historique. On embarque.

Au final, Guy Nadon nous démontre une fois de plus que nouveaux adjectifs devraient être inventés pour qualifier son immense talent d’acteur, Jean-Philippe Baril-Guérard insuffle enthousiasme, charme et vitalité à un personnage de jeune premier qui pourrait sembler linéaire, Sophie Desmarais joue correctement un rôle assurément trop lisse pour être intéressant, les serviteurs interprétés par Louison Danis et Pierre Collin sont fort amusants à voir aller, même si on perd la moitié de leurs répliques en raison d’une diction étonnamment défaillante et d’une disposition scénique qui les avantage peu, plusieurs passages de la poésie de Molière sonnent comme du blabla intangible dans la bouche de certains, alors que d’autres rendent la prose du défunt dramaturge grandiose et séduisante.

Le Théâtre du Nouveau-Monde nous offre donc une École des femmes inégale, mais somme toute agréable.

Par Samuel Larochelle, dit le Sage Gamin
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