mercredi 16 novembre 2011

« J’aimerais pouvoir rire » à l’Usine C : le talent brut de la famille Laurier

Si le public connait le talent d’actrice de Lucie Laurier depuis une petite éternité, il vient certainement de faire la rencontre avec celui, incontestable, pour la mise en scène. Jusqu’au 19 novembre, l’Usine C est le témoin privilégié de sa vision de la schizophrénie à travers la non-retenue des mouvements de son frère et de sa sœur.

Angela la danseuse et contorsionniste, petit bout de femme délicat et solide, arrive sur scène sous un majestueux tissu blanc recréant le mouvement des rêves et des pensées dénuées de limites de son frère Dominique, atteint de schizophrénie. Maitrisant un corps qu’elle fait bouger à la limite du possible, Angela épouse la folie des membres et de la psyché avec un laisser-aller libérateur et captivant. Arrive ensuite le fameux frère, Dominique, sur l’écran gargantuesque qu’est devenu le bout de tissu accroché au plafond. Il se raconte, se rappelle, son enfance en Colombie-Britannique, ses excès d’agressivité, le processus pour accepter le diagnostic de sa maladie. Frère et soeur partagent ensuite la scène. Angela exécute de splendides contorsions chorégraphiées sous les yeux attentifs de son frère, avant que celui-ci la rejoigne dans une danse endiablée, sans prétention et sans barrières, et la peigne sur un écran où sont projetées d’autres versions de leurs élans complices. On les sent s’amuser comme les enfants qu'ils ont déjà été : avec amour et sans jugement.

« J’aimerais pouvoir rire » mélange la danse aux arts visuels, le théâtre au documentaire et la poésie à la vie dans toute sa pureté, le tout supporté par une trame musicale envoûtante et enivrante.

Profitant du travail des interprètes qui sont complètement investis dans ce qu’ils font, la mise en scène de Lucie Laurier n’en finit plus de surprendre, d’émouvoir, de sensibiliser, de vulgariser et de fasciner. « J’aimerais pouvoir rire » est l’exemple parfait du laisser-aller contrôlé qui nous laisse sans voix.

Par Samuel Larochelle, dit le Sage Gamin
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