mercredi 11 janvier 2012

« Orphelins » au Théâtre La Licorne : impossible d’en sortir indemne !

Grâce au doigté avec lequel il dirige la pièce « Orphelins », écrite par Denis Kelly et traduite par Fanny Britt, le metteur en scène Maxime Denommée fait du théâtre qui remue et qui ne nous quitte plus. Du théâtre qui réussit à faire déraper les centaines de spectateurs du Théâtre de la Licorne. Du théâtre comme on l'aime.

Le dramaturge Denis Kelly n’a pas l’habitude de jouer dans la dentelle. Préférant tirer les ficelles d’une histoire débordant de fausses vérités qui se déchirent avec le temps, l’auteur se révèle aussi percutant avec "Orphelins" qu’il l’avait été avec "Après la fin", en 2008.

Les orphelins de Denis Kelly, Helen et Liam, frère et sœur unis devant l’adversité, voient leur triangle complété par Danny, l’amoureux de Helen. Le soir où Liam débarque à l’improviste chez le couple avec un chandail rempli de sang, la machine à questions s’emporte. Qu’est-ce qui s’est passé ? Qui est ce jeune adolescent victime d’une attaque vicieuse que Liam dit avoir aidé ? Doit-on appeler la police au risque d’incriminer Liam, qui s’est retrouvé sur les lieux par hasard ? Jusqu’où Helen est-elle prête à aller pour défendre son frère ? Danny acceptera-t-il d’embarquer dans la manigance ou est-il trop lâche pour bouger ? Peut-on réellement faire confiance à Liam ?

Le texte de Kelly est d’une richesse infinie. Habillement traduit par Fanny Britt - qui a su transposer en québécois la quantité de non-dits, d’hésitations et de vérités en demi-teintes - le travail de Kelly met en lumière deux concepts fondamentaux : la peur de l’autre et le sens de la famille. En quelques minutes, les spectateurs sont plongés dans une série de rebondissements et de réflexions sur les dérapes xénophobes de notre société. Les Étrangers sont-ils coupables jusqu’à preuve du contraire ? Doit-on protéger l'un des nôtres envers et contre tous ? Combien valent notre unité et notre confort ?

L’écriture de Denis Kelly est rythmée, punchée, drôle et intensément dramatique. Ses personnages sont forts et incarnés. Son histoire nous traverse le corps, sans nous vider ou nous abattre. Ses mots nous réveillent et nous obligent à remettre en questions nos propres valeurs.

La direction d’acteurs est impeccable. Évelyne Rompré, Étienne Pilon et Steve Laplante maitrisent la langue toute particulière du tandem Kelly-Britt et n’hésitent pas à mettre leurs tripes sur la table. Ayant à leur disposition une histoire puissante, écrite et mise en scène avec talent, les trois acteurs font d’Orphelins un grand moment de théâtre. Et de société.

Par Samuel Larochelle, dit le Sage Gamin

Théâtre La Licorne – 10 janvier au 18 février
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