mercredi 10 octobre 2012

Critique de « Chlore » à La Licorne : prêts pour des montagnes russes d’émotions ?


Même si les auteurs et metteurs en scène Florence Longpré et Nicolas Michon ont bien peu d’années de métier derrière la cravate, ils ont déjà tout ce qu’il faut pour nous faire rire et pleurer avec une habileté et une ingéniosité hors du commun, en nous racontant une histoire aux prémisses terrifiantes. 

À 9 ans, la petite Sarah est grassouillette, pétillante et débordante de joie. Elle danse, elle chante, elle vivote et chacune de ses respirations est source d’exaspération pour les enfants du quartier. Son existence est à ce point dérangeante que deux garçons décident un jour de la forcer à boire du chlore et l’abandonnent pendant des heures dans un cabanon, sans corps et sans voix. 

La pièce du tandem Longpré-Michon s’ouvre quelque dix ans plus tard, alors que la jeune femme surnommée « gros tas » croupie dans son sous-sol, incapable de bouger ou de parler, mais réussissant à communiquer grâce à son regard et à un système de code avec des lettres et des clignements d’yeux. Depuis l’accident, son quotidien se limite à sa chaise roulante, sa douillette et ses parents, jusqu’à ce qu’un jeune homme du voisinage vienne la visiter deux fois par semaine, pendant des mois. 

La situation dans laquelle est plongée Sarah pourrait s’avérer désastreuse pour le rythme de la pièce, mais il n’en est rien. Outre la quantité impressionnante d’émotions que l’actrice Debbie Lynch-White fait vivre à son personnage avec le peu de moyens physiques qui sont mis à sa disposition, la mise en scène se charge de dynamiser tout ce qui s’offre à nous. 

D’abord, l’idée de faire appel à quatre ballerines à différents moments de la pièce est tout simplement géniale. Représentant ce que la fillette était et ce qu’elle ne sera jamais plus, les danseuses servent également d’accessoires, représentent en mouvements les anecdotes racontées par les autres personnages et aident à déplacer les meubles sur scène. Voilà une trouvaille ingénieuse et fichtrement bien utilisée. La trame sonore, composée de vieilles chansons quétaines et de vieux succès des années 80 et 90, agrémente également les différents tableaux de la pièce.

Le texte de « Chlore » regorge d’images évocatrices, de blagues efficaces, de moments chargés d’émotions et de surprises. Pendant plus de 80 minutes, on passe du rire aux larmes, de la compassion à la dérision, sans jamais avoir l’impression que la tension dramatique s’effondre ou que l’équilibre de l’histoire est sacrifié. 

Aux côtés de Samuel Côté, quelque peu hésitant en ce soir de première, mais tout de même très juste, Claude Poissant et Annette Garant nous démontre à quel point ils sont de grands acteurs d’expérience. Même si le personnage de Poissant est peu expressif, sa présence et la profondeur de sa voix suffisent à nous interpeller à chaque instant. Quant à Garant, elle est tour à tour nerveuse, drôle, aimante, délicate, fragile, brisée et sereine. C’est à ce se demander pourquoi on ne la voit pas davantage sur les planches, au petit et au grand écran. 

La Petite Licorne présente jusqu’au 26 octobre prochain une pièce que vous devez absolument voir.

Par Samuel Larochelle, dit le Sage Gamin
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